J'ai trahi mes convictions pour un slip

Ce qui est bien lorsqu'on ignore systématiquement les magasins de la grande distribution des stocks de chaussures, de sweat-shirts, de doudounes, de manteaux chics en polyester, de robes du nouvel an, de chaussettes et de sacs à main, c'est, qu'un soir, par hasard, perdue dans la foule et se disant qu'on est quand même un peu ringarde, mais qu'on préfère ça à s'ébahir devant un lecteur mp3 dont on vient de déchirer fébrilement l'emballage devant ses copains qui ont l'air si désinvoltes, comme si ça leur arrivait tous les jours (alors qu'ils ne regardent vraiment que les baskets en solde), qu'un soir comme ce soir, où je rentrais chez moi après être passé emprunter Shoah de Claude Lanzmann (oui, c'est une bonne nuit en perspective), je me suis donné la permission d'aller m'acheter des culottes neuves (et bien que j'hésite sur cet accord du participe, je vais terminer ce billet). En passant à la caisse je me suis étonnée que ce soit si facile, et j'ai senti souffler le vent de l'histoire, comme si le mur de Berlin venait de tomber (et que je ne savais pas encore que ce n'était pas une si bonne chose), et que, polonaise, je trouvais enfin des chewing-gum Hollywood à la caisse du supermarché tout neuf.